ACTUALITÉS NATIONALES • Article #3
UNE NOUVELLE AIDE POUR LES VICTIMES DES VIOLENCES CONJUGALES
S'éloigner du partenaire violent pour se protéger
La création de l'aide d'urgence pour les victimes de violences conjugales est issue d'une proposition de loi visant à lutter contre les violences conjugales, adoptée à l’unanimité et promulguée le 28 février 2023 (loi n°2023-140 du 28 février 2023) pour une entrée en vigueur 9 mois après sa promulgation.
Sous forme d'appui financier, cette nouvelle aide doit permettre à une victime de violences conjugales de prendre de la distance physique avec l'auteur des violences et constitue ainsi une première réponse pour organiser son départ.
Elle est versée par la Caf à toute personne (homme ou femme, sans limite d'âge, avec ou sans enfant), victime de violences attestées par un document datant de moins de 12 mois à la date de la demande : dépôt de plainte, ordonnance de protection, signalement au procureur de la République. Elle peut être en couple (marié, pacsé ou union libre) ou déjà séparée du partenaire violent sous réserve que les violences aient eu lieu moins d'un an avant la demande.
Modalités de l'aide d'urgence pour les victimes de violences conjugales
L'attribution de l'aide n'est pas soumise à conditions de ressources. Cependant, le montant de l'aide sera calculé en fonction des revenus du demandeur ainsi que sa composition familiale.
La loi prévoit deux modes de versements :
Aide non remboursable si les ressources sont inférieures à l'assiette ressources fixée (supérieure à 1,5 fois le SMIC);
Prêt sans intérêt si les ressources sont supérieures à l'assiette ressources. Dans ce deuxième cas, la justice peut condamner l'auteur des violences à le rembourser.
ACTUALITÉS NATIONALES • Article #2
LES MILLES ET UNE FAÇON DE TUER UNE FEMME
Par Marie-Josée Ayotte
Les mille et une secondes à ne pas être voulue, à arriver comme un cheveu tombé dans la soupe au rire jaune, l’enfant fille moins utile, il n’est pas un elle, la surpopulation et son lot de trop.
Les mille et une minute à être ignorée, à ne pas exister dans le regard du père, du frère, ou pire, de la mère, arrange-toi toute seule fille, débrouille-toi, mais sers à tout, sers-nous.
Les mille et une heures à être mal payée, salaire égale fesses à l’air, t’es ben belle, montre-moi ton cul, vends-le au plus sacrant, partage-le donc, ton ventre aussi tant qu’à être dans le trafic, on va le louer pas cher, pas cher.
RÉFUGIÉE DE NULLE PART...
Les mille et une journées à errer sans feu ni lieu, sans attaches ni frontières, réfugiée de nulle part, la folle à lier, l’hystérique de service amputée des mains, la gelée au cœur trop chaud, l’écorchée vive de l’itinérance, la chair à canon d’homme.
Les mille et une nuit à être épiée, traquée, l’étouffée du prédateur, l’étranglée du cri de secours, la dénudée sans consentement qu’on toisera à coup de tu mens, la laissée pour morte au fond du lit, du truck, du parc-école, de la ruelle aux échos de marelle.
Les mille et une années de la mal mariée, mal baisée, mal aimée, de la voile-toi tentation, du coupe-toi plaisir, excise-toi jusque dans le cerveau, excuse-toi pour la vie, tais-toi à mort.
LES DISPARUES DE LA CARTE...
Les mille et une décennies de la journée de la femme pour célébrer toutes les disparues de la carte, toutes les assassinées sans laisser de traces, toutes les parties mutilées sans laisser d’adresse, les fugueuses de la planète mourante, les bouleversées des vies mortes-nées.
Les mille et une façons de tuer une femme avant qu’elle ne le devienne, avant qu’elle ne soit forte et furie, avant qu’elle ne prenne le pouvoir, soit chef, avant qu’elle ne reprenne ses droits, ne change les lois, avant qu’en elle, en l’avenir, en l’humanité, en elle pour toujours, en elle sa foi explose.
Mis en ligne sur Sisyphe, le 29 février 2020 : http://sisyphe.org/spip.php?article5565
LE COMBAT DES VIOLENCES • Article #1
UNE VOLONTE POLITIQUE
Il a suffi de quelques coups de feu tirés sur un parking et la vie s'est arrêtée brutalement. Des fleurs sont déposées discrètement sur le lieu du drame, en silence. Des voisins expriment le regret de n'avoir rien dit, de n'avoir pas agi.
L'instruction sera longue. La procédure pénale doit garantir les droits de l’agresseur. Les droits de la victime pensés pour sa protection, existent également mais ne sont pas forcément appliqués. Elle avait déposé plainte. Elle avait déjà dit ce qu'elle subissait. Si elle en avait eu le temps… Ce temps bienveillant de l'écoute où s'établit le lien de confiance, où le silence se brise, où les émotions trop longtemps contenues se libèrent. Ce féminicide ne doit rien au manque de chance, il s'inscrit comme la centaine d’autres et de ceux qui viendront dans une sous-évaluation du danger.
Après, c’est d’une volonté politique dont nous avons besoin. De celle qui prend les problèmes à bras le corps et ne les lâche plus. De celle qui ne coupe pas dans les subventions mais renforce la formation de tous les professionnels, l’information du public et protège les femmes et les enfants.
NON ASSISTANCE À FEMMES EN DANGER
L’ex Procureur de Douai, Luc Frémiot, engagé depuis une quinzaine d'années dans la lutte contre les violences conjugales, auditionné par la Délégation aux droits des femmes du Sénat déclarait en 2020 : « Tant qu'il n'y aura pas un contrôle précis des fonctionnaires de police, des gendarmes ou des Parquets qui doivent mettre en place les nouvelles dispositions issues du Grenelle contre les violences conjugales, on n'y arrivera pas ». Il estime que « les femmes ne sont pas prises au sérieux comme elles devraient l'être ».
En février 2021, interviewé à l'occasion de la sortie de son livre « Non-assistance à femmes en danger », ce même Luc Frémiot déclare « C'est un mensonge de dire que la parole des femmes est libérée alors que seulement 18 % des femmes viennent déposer plainte et on ne compte pas le chiffre noir de celles qui ne parlent pas ».
ENFANTS VICTIMES
En France, nous avons très peu de chiffres et pas d’enquête de victimisation directe auprès des enfants, mais à partir de celles faites auprès d’adultes qui rapportent les violences subies durant leur enfance, nous pouvons estimer que chaque année, plus de 140 000 enfants sont exposés à des violences conjugales (Enquête « cadre de vie et sécurité » de l’Observatoire National de la Délinquance et des Réponses Pénales 2012/2015).
Comme l’ont démontré de grandes études épidémiologiques internationales sur les ACE « Adverse Child Hood Expériences » soit en français « les expériences négatives de l’enfance » depuis 1998 (Felitti et Anda, 1998, 2010, Hillis, 2016, Brown, 2009), ce risque est gradué en fonction de la gravité des violences et de leur nombre.
FACTEURS DE RISQUES
Quels sont les facteurs de risques, pour un enfant, de vivre des expériences négatives s’il est exposé à des violences conjugales ?
• le risque de se suicider ou de faire des tentatives de suicides est multiplé par 12,
• le risque d’être alcoolique est multiplé par 7,
• le risque d'être toxicomane est multiplé par 4,
• le risque tabagique est multiplé par 2,
• le risque d’être obèse est multiplé par 1,6,
• (le risuqe d’être déprimé est multiplé par 5.
Source Ministère de la Justice et de l'Intérieur
Au 26 décembre 2022, 106 féminicides ont eu lieu en France.
• Dans 86 % des cas, les auteurs sont des hommes.
• Dans 80% des cas, le meurtre se passe au domicile du couple.
• 50% des féminicides se font en milieu rural.
• 91% des cas de viol et/ou tentative de viol sont perpétrés par une personne connue de la victime.